Catherine Labelle
Greffée des poumons
Entre l’ombre et la lumière
Il fait noir dans le garage cette nuit. Je marche péniblement, et mes jambes sont tremblotantes. Une de mes mains tient une canne et l’autre une lampe de poche.
Je regarde autour de moi sans comprendre pourquoi je suis dans ce garage si froid et lugubre, dont l’air est humide. Ce lieu immense comme un labyrinthe me fascine et me terrifie à la fois.
Après avoir marché pendant une bonne heure, la batterie de ma lampe de poche est à plat. Je trouve une cabine où je m’arrête pour reprendre des forces dans l’espoir d’atteindre le stationnement et d’enfin sortir du garage.
… épuisée, je m’endors, le corps recroquevillé. À mon réveil, je ne me souviens pas où je suis. Confuse, je regarde autour de moi et je vois du coin de l’œil des gens qui marchent vers le stationnement. Il est multicolore et les gens sont souriants, calmes et sereins.
Je suis déshydratée et je vois un puits d’eau. Je vais me rafraichir avant de poursuivre ma route. Une femme m’interpelle et me dit que je n’ai pas le droit d’aller boire au puits. Pourtant, beaucoup de gens vont y étancher leur soif et personne ne leur en interdit l’accès.
Me voyant affaiblie, cette femme entre dans un casse-croûte à côté du puits d’eau et me tend gentiment un gobelet d’eau.
Ma bienfaitrice voit que je commence à me sentir mieux et s’en va, le sourire aux lèvres. Elle me fait un signe de la main en guise d’au revoir.
Je reprends ma route et je vois sous mes yeux, apeurés et tristes, une personne qui est décédée. Au même moment, je vois mes poumons grisâtres changer de couleur. Une lumière rose en émane.
Je me sens à la fois tranquille et anxieuse. Je croise à nouveau des gens qui s’approchent de plus en plus du stationnement et tous mes membres se mettent à trembler incontrôlablement.
Dans le stationnement, je me mets en file pour prendre le bus. Un contrôleur vient vers moi et me dit que je ne peux pas encore partir. Il me donnera mon billet bientôt. Je dois retourner dans le garage pour me reposer et retrouver ma vitalité.
Je me mets à pleurer devant le contrôleur. D’un geste bienveillant, il prend ma main et m’amène dans une grande pièce du garage où il m’indique un lit. Je suis troublée en regardant ce lit où une femme est couchée, branchée à chaque extrémité de son lit d’hôpital à des drains thoraciques. Elle est en train de dormir.
Cette femme qui a eu, il y a quelques jours, une greffe de poumons, c’est moi. Je suis en train de me régénérer avant de reprendre le chemin de la sortie, celui vers ma nouvelle vie.